Elle a constaté que bien des personnes talentueuses n’arrivaient pas à faire leur place au soleil. Elle a vu un grand nombre de ses contemporains avoir du mal à s’intégrer à leur communauté d’accueil, faute de s’y reconnaître. Parce qu’elle est elle-même passée par là, Flore Odou Onguetou s’est dit « Assez ! » et a décidé d’agir. Portrait de la cofondatrice et directrice générale de l’organisme Communauté noire en région, qui a aussi créé le Réseau des femmes en action.   

Par Marie-Carole Daigle

(Collaboration spéciale) 

« À la base, je suis une entrepreneure, rappelle celle qui est aussi propriétaire du salon de coiffure et spa Beauté à l’africaine, situé à Terrebonne. L’OSBL Communauté Noire en région est un tremplin que Fatou Diop et moi avons mis sur pied pour soutenir les entrepreneurs noirs en région, car ils avaient de grands défis de visibilité et même d’accès aux ressources. Nous avons donc organisé des activités mensuelles – comme des petits déjeuners d’affaires – auxquelles nous avons invité des chefs d’entreprise de diverses communautés. Notre idée, c’est que chacun puisse faire plus que de tisser des liens : nous voulons provoquer des maillages et former petit à petit un réseau fort, pour en arriver à nous donner des modèles. »

Qu’une personne soit racisée ou immigrante, elle peut aussi s’adresser à l’organisme pour connaître les ressources à sa portée. « Notre rôle, c’est de maîtriser tous les programmes et, grâce à nos divers partenariats – notamment avec le Groupe 3737, le Fonds Afro-Entrepreneurs, Evol, Entreprendre ici et les chambres de commerce –, d’offrir un suivi personnalisé qui favorise la réussite et l’inclusion. Car chacun doit avoir sa place. C’est pour cela que nous sommes là. »  

Un travail de rassembleuse régionale

Le constat le plus clair ? « En échangeant avec les participants, j’ai bien vu que j’ai bien même que si les gens avaient quitté la grande région de Montréal et choisi de vivre en région, ils gardaient leurs habitudes de consommation montréalaises ! Autrement dit, ils avaient beau avoir acheté une maison à Terrebonne, par exemple, ils continuaient de se rendre à Montréal pour obtenir les produits et services nécessaires à leur quotidien ! Après avoir réussi une intégration, c’est comme s’il leur fallait maintenant amorcer une réintégration ! Pourtant, si une femme racisée cherche des produits capillaires conçus pour elle, il y en a, en région ! Et si vous voulez manger du tchéké, on en trouve aussi ! Mais on l’ignore. Voilà pourquoi nous sommes en train de préparer un bottin de ressources, que nous prévoyons lancer en juillet prochain. On va ainsi non seulement faire connaître et soutenir les gens de la région, mais cette visibilité va faciliter un référencement qui encourage le “consommer local” et permettre à nos entrepreneurs de laisser leur empreinte sur le développement économique d’ici. La communauté va s’approprier les commerces d’ici. Tout cela fera surgir un meilleur vivre-ensemble. »

L’émergence de modèles

Après avoir créé son entreprise il y a cinq ans, Flore Odou Onguetou a bien vu que l’inclusion était tout un enjeu pour la communauté afrodescendante. Avec d’autres femmes immigrantes, elle a donc également lancé en 2023 le Réseau des femmes en action (RFA) qui a pour mission de favoriser l’autonomisation socioéconomique des femmes en les outillant sur le plan de leur développement tant personnel que professionnel et entrepreneurial. « Ces femmes vivent bien souvent des moments très difficiles, signale la fondatrice. Eh bien, nous sommes présentes à tous ces niveaux ! 

Le RFA les sensibilise à la prévention de la violence, en plus de leur proposer un mentorat qui travaille leur savoir-être et leur donne les moyens de rester dans l’action entrepreneuriale, de continuer de faire ce qui les passionne. Et surtout, nous travaillons pour que toute personne sans exception, peu importe son statut social, son âge ou son genre, ait accès aux mêmes possibilités que les autres. » 

Flore Odou Onguetou estime que l’atteinte de cet objectif passe par la diffusion de l’information. « Cette information doit se rendre, et c’est une chose pour laquelle je me bats. Nous avons déjà commencé à le faire, et je veux que cela nous aide à continuer de créer des succès stories et des modèles qui permettront une inclusion véritable ! » Pour cette femme engagée, l’inclusion ne doit pas juste être un mot qu’on utilise par-ci, par-là : « Ce mot doit être réellement visible dans chaque secteur d’activité ! »