Camerounaise installée à Québec, en 1992, Pulchérie Mboussi est une entrepreneure aguerrie et chantre de l’africanisme au Canada. Portrait de la fondatrice du festival AfriCa-Fest.
Réputée comme chantre de l’union africaine, Pulchérie Mboussi est celle qui fait rayonner l’Afrique et les Caraïbes à Victoria, la ville nommée en honneur de la reine éponyme, en Colombie-Britannique. À Québec également. Cette figure incontournable de la diaspora africaine autant combative que forte et ingénieuse a tissé les liens entre les communautés à Québec – deuxième ville la plus peuplée de la Belle province après Montréal – et à Victoria.
Quand elle a immigré au Canada, l’absence d’événement majeur spécifique aux personnes d’ascendance africaine le désenchante. Ce constat l’amène à ouvrir « le premier institut de beauté » de sa communauté. L’institut devient rapidement un lieu de socialisation, et surtout de retrouvailles pour la diaspora africaine de la ville de Québec. L’aventure a pris fin neuf années plus tard.
S’ensuit le restaurant Le Kilimandjaro fermé l’espace d’un cillement. « L’absence d’une étude de marché et les retards accumulés pour obtenir de la ville le permis de fonctionnement obligatoire ont eu des effets néfastes sur l’entreprise en demarrage », concède Pulchérie Mboussi. À ces diverses initiatives, s’ajoute Issamba Centre. Dans le dialecte Beri du Cameroun, issamba signifie « se rassembler ». En plus d’être une plaque tournante pour les personnes d’ascendance africaine, le centre considéré comme une porte d’entrée à Victoria offre des services d’accompagnement à ses usagères et usagers. Il promeut aussi la culture par le biais d’activités et d’événements qui célèbrent les traditions africaines et caribéennes : danse, musique, littérature et arts culinaires.
Nourrissant toujours le désir de faire découvrir aux Québécoises et aux Québécois le précieux patrimoine culturel du continent africain, elle était obligée de faire un retour aux études. « Étant fervente de l’union africaine, je voulais créer un espace où l’Afrique dans l’ensemble était représentée, où les gens pouvaient célébrer ou découvrir les richesses artistiques du continent », explique Mboussi en entretien avec COM1. Pour réaliser ses rêves, elle se donnait un ressort académique en s’inscrivant au programme de gestion d’événements et congrès au Collège Mérici. Elle a aussi fait des études en gestion touristique à l’Université Laval à Québec.
L’idée du festival est germée au collège qui exigeait une proposition de projet de fin d’études aux étudiantes et étudiants du programme. « Chaque rubrique du projet doit être axée autour d’une tâche particulière ou applicable à un festival ou autre type d’événement. Par conséquent, j’ai soumis AfriCa-Fest comme projet à la direction du programme », se souvient celle qui se plait à vivre entre Victoria et Québec, la ville qui l’a accueillie le premier au Canada.
« Le projet était voué au rayonnement des communautés issues du continent africain à Québec. Mais avec l’émergence du mouvement de la décennie internationale des peuples d’ascendances africaines, j’ai convenu d’élargir l’angle du festival aux personnes d’ascendance africaine incluant les Canadiens et Canadiennes originaires d’Haïti, des Antillais et des Caraïbes », a encore expliqué la fondatrice de AfriCa-Fest.
C’est trois ans plus tard, en 2013, que Pulchérie Mboussi a lancé, à Victoria, l’événement tenu annuellement autour de la journée mondiale de l’Afrique qui célèbre l’anniversaire de la signature des accords de l’Organisation de l’Unité africaine (OUA), le 25 mai 1963. L’idéal collectif des pays d’Afrique, en effet, est de vivre pleinement le panafricanisme comme procédure d’intégration des économies africaines aux plans politique, économique, social et culturel.
Pour la première fois, cette année, la fondatrice du festival se fait un point d’honneur à dédier la dixième édition à la richesse de la culture des Québécoises et des Québécois d’ascendance africaine. Ce fut une immersion musicale, gastronomique et artisanale, durant trois jours.
La récente édition a eu un retentissant succès, avec quelque 5000 festivaliers ainsi que la participation d’une vingtaine d’artistes et une trentaine d’entrepreneurs d’ascendances africaines et caribéennes, selon des chiffres cités par l’organisation. « Cette diversité m’enchante, sourit Mme Mboussi qui raconte le cheminement du festival. Des événements comme celui-ci offrent les moyens de se forger une identité commune et de préserver ou encore renforcer le sentiment d’appartenance aux communautés impliquées. »
Cette réussite, elle la doit à ses qualités de gestionnaire d’événements, sa ténacité et aussi à ses collaboratrices et collaborateurs notamment Jean-Marie Touré, coordonnateur du festival à Québec.
Pour inciter davantage de jeunes à maintenir les liens qu’ils entretiennent avec leur pays d’origine, le comité organisateur du festival lorgne des têtes d’affiche. Un appel à proposition est ainsi lancé aux vedettes issues des communautés afrodescendantes du Québec, de l’Afrique et des Caraïbes.