Par Pierre-Raymond Dumas
Il faut lire absolument Un carnet oublié en été, en juillet. Justement on y est ou presque! C’est un régal de vivacité. Virginia Pesemapeo Bordeleau qui ne donne jamais d’ennui construit un univers où l’amour se perd, des dialogues où se reflète la complicité de l’existence humaine. La douleur qui peut suivre la réalisation de la rupture d’une aventure est souvent vue comme signe de l’atteinte de cette capacité volatile.
Bref récit sur un amour improbable – entrecoupé de flash-back par l’entremise d’un carnet –, la trame ici se déploie comme un jeu de miroir. La prose de Virginia Pesemapeo Bordeleau est simple, directe, mais séduisante : elle est construite probablement sur une expérience vécue comme une autobiographie, mais ce n’est pas un huis clos. L’artiste multidisciplinaire eeyou avec son ton réaliste n’en est pas moins émouvante, sans fioritures, grâce à l’évocation de personnages et de sentiments ancrés dans la sobriété, établissant des paysages et des scènes qui s’éloignent de l’outrecuidance pour offrir une impression plus vivante, en phase avec les situations géographiques et les monologues.
L’un des points forts de l’écriture de cette romancière et poétesse est son attention portée à chaque mot : impossible de ne pas indiquer que la concision de ce récit est aussi accompagnée par un nombre réduit de protagonistes (Kokum, Mathieu, Gabriella). La dynamique intergénérationnelle est particulièrement présente dans cette mise en scène où la narratrice apparaît comme une grande mère confrontée au regard ou questionnement de ses petites-filles. Évidemment, ce devoir de transmission est sublimé par la sincérité et la densité des souvenirs décrits jusque dans leur transparence sensuelle.
Virginia Pesemapeo Bordeleau. Un carnet oublié, Éditions Hannenorak, Québec, 2024.
| À propos de l’auteure Née à Jamésie, dans le nord-ouest du Québec, Virginia Pesemapeo Bordeleau est une artiste multidisciplinaire eeyou. Depuis quarante-quatre ans, elle expose ses œuvres au Québec, au Canada, en Europe et au Mexique. Depuis 2007, elle a publié trois romans, trois recueils de poésie, un livre de contes, un essai et un livre d’art. Elle reçoit la médaille de l’Assemblée nationale du Québec pour l’ensemble de son œuvre en 2021 et nommée chevalière de l’Ordre des Palmes académiques de la République française en 2023 (4e de couverture de Un carnet oublié. De rouge et de blanc, son premier recueil de poésie (Mémoire d’encrier, 2012), a reçu la mention Télé-Québec du Prix littéraire de l’Abitibi-Témiscamingue. Virginia Pesemapeo Bordeleau est présentée comme la première femme autochtone à avoir écrit un roman érotique en français avec L’amant du lac (Mémoire d’encrier, 2013). Ses œuvres notoires contiennent entre-autres : Ourse bleue (La Pleine lune, 2007), L’enfant hiver (Mémoire d’encrier, 2014), Je te veux vivant (Éditions du Quartz, 2016). |


