Les révélations sur les dépenses exorbitantes à l’Office de consultation publique de Montréal (OCPM) ont défrayé la chronique pendant le mois de novembre 2023. Pour sa gestion financière questionnable, cet organisme indépendant qui favorise la citoyenneté participative et urbaine était dans le viseur du Bureau d’enquête de Québecor.
Dans la foulée de ce scandale, plus d’un en profite pour baver sur Dominique Ollivier, ancienne présidente de l’OCPM (2014-2021). Mise en cause, elle est jugée par « le tribunal de l’opinion publique » qui « ne connait pas de règles de droit », a-t-elle écrit dans sa lettre publiée dans Le Devoir quatre jours après sa démission de la présidence du comité exécutif de la Ville de Montréal, le 14 novembre. Une semaine plus tard suivait la destitution de sa successeure à la tête de l’OCPM, Isabelle Beaulieu. Celle-ci avait acheté, entre autres, des écouteurs à 900 dollars, selon l’enquête.
L’imprudence de Dominique Ollivier a été de penser peut-être qu’elle pouvait se permettre de consommer un repas d’huîtres à 347 dollars à Paris dans un cadre amical aux frais de la princesse. Même si les journalistes de l’empire Québecor voulaient à tout prix la faire tomber, comme l’a souligné Pierre Gince du journal Affaires, il revenait bien avant à Mme Ollivier de tenir compte d’un certain nombre de paramètres et, pour toutes les raisons qu’elle connait, de faire attention dans ses actions.
Un traitement différent dans l’espace public élargi a été réservé aux deux femmes à qui sont reprochées les dépenses excessives (achats et voyages) estimées à des dizaines de milliers de dollars. L’opinion publique a surtout prononcé son verdict à l’encontre de la fille du feu écrivain Émile Ollivier*. Mme Ollivier dit avoir reçu des messages liés à la misogynie et au racisme. La fameuse phrase ridicule « Retournez chez vous » figure sur la liste. Et cela en dit long.
L’ignorance d’un groupe de Québécois « de pure laine » est celle de croire qu’ils détiennent exclusivement la légitimité de décider qui est ou doit être d’ici ou ailleurs. Or, en aucune façon, ils ne peuvent être les seuls à jouir pleinement de leur droit de citoyenneté canadienne dans la province du Québec. Pourquoi les Premiers peuples et les personnes immigrantes, les Noirs et les Arabes, sont-ils souvent victimes de discrimination? La réponse se trouve dans la question. Sans doute.
Ici, c’est chez Dominique Ollivier aussi. Oui, nous sommes tous chez nous. N’en déplaise à ceux qui ont du mal à l’admettre. Le Québec est et devient la terre des Autochtones, des descendants d’anciens colons et des personnes issues de l’immigration après la fin de la Nouvelle-France et au lendemain de la souveraineté britannique jusqu’à nos jours.
Nous constituons tous le Québec et le Canada d’aujourd’hui. Et nous devons tous faire bon usage des fonds publics. * Après des études en France, Émile Ollivier s’est installé en 1966 au Québec où il fut enseignant, professeur agrégé en 1987, professeur titulaire en 1992 et à titre posthume, professeur émérite. Né en 1940 à Port-au-Prince et mort en 2002 à Montréal, ce « Québécois le jour et Haïtien la nuit » a reçu une dizaine de prix et distinctions au cours de sa carrière.