Robyn Maynard est une combattante exemplaire du profilage racial, de la violence et de la déportation. C’est ce que démontre en détail la parution de son livre édité chez Mémoire d’encrier à Montréal en 2018 : Noires sous surveillance. Esclavage, répression, violence d’État au Canada. Ce livre est au-delà de toute visée documentaire. Il contient une mine d’informations à la fois historiques et sociologiques sur les conditions d’existence des Noirs vivant au Canada avant même la Confédération.
Par Badou Pierre
Le livre de Robyn Maynard, constitué de huit chapitres, explique avec brio les côtés sombres de l’histoire des Canadiens noirs ou AfroCanadiens. Il traite des réalités violentes des navires négriers et des prisons en passant par les salles de classe. Ce livre d’une grande force d’ancrage conceptuel restitue quatre cents ans de surveillance, de criminalisation et de punition de la vie des Noirs au Canada.
Dans son introduction, Robyn Maynard retrace les seuils de tolérance du Canada : « Le Canada, pour la plupart de ses citoyens comme pour de nombreux étrangers, est un modèle de tolérance et de diversité, une référence mondiale en matière de droits de la personne. Cette réputation des plus enviables, le Canada le doit notamment au fait qu’il a accueilli les esclaves noirs fuyant les États-Unis par le chemin de fer clandestin » (Maynard, 2018, p. 9).
Ce livre est une exploration courageuse et pénétrante de la traite des personnes et des violences institutionnelles. À l’aide d’une analyse soigneuse des archives et des témoignages des victimes, Robyn Maynard démontre comment les systèmes des contrôles sociaux perpétuent la servitude et l’oppression dans nos sociétés contemporaines. Et, son livre reste un essai-témoignage, un essai-mémoire sur l’évolution de la lutte des Noirs, de l’esclavage, du racisme et du capitalisme.
D’une page à l’autre, Robyn Maynard montre comment l’industrie carcérale, la surveillance policière et la violence raciste sont des formes modernes d’esclavage. Car ses différentes formes modernes d’esclavage reproduisent les mêmes structures de domination que la traite des esclaves du passé. Robyn Maynard rappelle les lecteurs que si la forme de la servitude a évolué, la brutalité du traitement infligé aux personnes réduites en esclavage n’a pas changé.
Dans ce livre, cette essayiste avertie et douée d’une grande intelligence aborde la façon dont la traite des personnes est liée aux inégalités économiques et sociales. Bien que les personnes de couleur soient habituellement les plus touchées par l’exploitation, les groupes défavorisés sont vulnérables au commerce des êtres humains. C’est une problématique majeure que cette autrice réussit à circonscrire dans son essai. Noires sous surveillance.
L’essai de Robyn Maynard expose de manière visible la relation entre esclavage, racisme et capitalisme. Il propose des pistes de réflexion pour lutter contre toutes formes d’injustice sociale. C’est un livre à la fois intéressant et enrichissant. Ce livre mérite d’être lu par toutes les personnes intéressées à la justice sociale et à la création d’une société plus juste.
Référence
Maynard, Robyn. 2018. Noires sous surveillance : esclavage, répression et violence d’État au Canada. Montréal (Québec) : Mémoire d’encrier.
À PROPOS DE L’AUTEURE
Militante aguerrie, Robyn Maynard s’implique dans les mouvements contre le profilage racial, la violence policière, la détention et la déportation depuis plus d’une décennie.
Elle a écrit dans le Washington Post, World Policy Journal, Toronto Star, Gazette de Montréal et dans le Canadian Women’s Studies Journal. Ses écrits sur les enjeux de la race, et du genre, ainsi que la discrimination sont enseignés au Canada et aux États-Unis.