En février 2022, alors que j’ai assisté à une activité sur le Mois de l’Histoire des Noirs, j’ai été stupéfait du sarcasme d’un participant : « On nous donne le mois le plus court et le plus froid de l’année pour célébrer les riches contributions de nos communautés au rayonnement du Canada et du Québec. »

Sur le coup, j’étais très emballé par ce commentaire, quoi que j’avoue un peu réductionniste. Je me disais alors, devrait-on, en réalité, se contenter de ce peu qu’on nous donne? Ou du moins, devrait-on en demander davantage? Cependant, le constat que j’ai fait une année plus tard au sein des communautés noires et racisées, majoritairement en provenance de l’Afrique subsaharienne et des Caraïbes, me ralentit un peu dans cet élan émotionnel. On n’exploite pas suffisamment ce peu que l’on nous donne. Les communautés racisées disposent de beaucoup de ressources, mais trop dispersées.

Au point que je préfère me demander aujourd’hui: qu’est-ce qu’on fait de ce peu qu’on nous donne? En profite-t-on efficacement? Et même si on avait tous les mois de l’année, saurait-on en profiter?

Peut-être oui! Mais là, ce serait à condition que nous coordonnions nos efforts, qu’on unisse nos forces pour mener de façon plus efficace ce combat de longue haleine. À condition qu’on décide de maximiser nos ressources quantitatives et qualitatives pour faire tomber les obstacles qui obstruent encore la route et l’avenir de nos communautés afrodescendantes.

Rien que pour le mois de mai 2023, j’ai pu suivre près d’une dizaine d’activités et d’initiatives émanant des communautés noires et racisées à Montréal et à Laval. Toutes, ou presque, avaient une trame commune : mettre en avant le rôle essentiel des dites communautés dans l’écosystème culturel québécois et canadien. Visiblement, c’est une bonne chose.

Toutefois, chaque activité réunit toujours ou presque les mêmes acteurs, les mêmes OBNL. Chacun dans son petit coin veut sortir la tête de l’eau, cherche un peu de visibilité et relègue finalement au second plan, sans le vouloir peut-être, quelque chose de plus précieux : préserver et promouvoir ce patrimoine enrichissant que nos communautés représentent sur le plan socio-économique pour le développement au pays d’accueil.

Je pourrais saluer en ce sens l’initiative de fonder l’Observatoire des communautés noires du Québec, regroupant une cinquantaine d’organismes et qui se donnent pour mission, entre autres, d’étudier en profondeur les difficultés rencontrées par les jeunes AfroQuébécois afin de proposer des solutions concrètes en leur faveur.

Nous avons tellement de défis que nous pourrons mieux aborder, si nous maximisons nos ressources au lieu de les morceler, de les émietter pour un peu de visibilité. Ne ferait-on pas mieux d’optimiser nos initiatives au lieu de défendre la même cause de façon isolée?

Au lieu d’avoir mille et une petites activités, qu’on se mette ensemble pour une démonstration plus grandiose de cette force extraordinaire que nous sommes au Québec et au Canada.

Selon des données diffusées par Statistique Canada, la population noire représente actuellement 4,3 % de la population totale du Canada et 16,1 % de la population racisée. C’est significatif. N’est-ce pas? Nous pouvons mieux faire ensemble. C’est souvent plus productif.