Journaliste-présentateur à France 24, Robert Philomé a publié, en début d’année 2022 Vagabondages éphémères. Clin d’œil sur ce roman savoureux traitant de l’exil, des voyages, des rencontres, des amours et des ruptures!
Quand nous commençons à lire Vagabondages éphémères, l’envie nous tient tout de suite de nous plonger dans cette histoire à rebondissement et ponctuée de grands moments d’émotion. Publié chez Caraibeditions, ce roman oscille entre déceptions et aversions contre un pays qui oblige ses enfants à suivre les chemins de l’exil, fréquemment parsemés de bonheurs fragiles, de bribes d’amour tantôt douces, tantôt coquines.
Robert Philomé nous raconte l’histoire de Gabriel, ce jeune architecte, qui laisse sa terre natale en raison des situations difficiles qu’il a connues. Gabriel a une vie tourmentée, peuplée de tristes souvenirs et de fractures psychologiques. Il a vécu dans un foyer instable avec des ruptures répétées entre ses parents et un père très peu expressif qui ne lui donne pas suffisamment d’attention. Mais, c’est surtout la disparition brutale de sa mère, happée par un véhicule du cortège présidentiel de Duvalier, qui hante son esprit. Il avait seulement neuf ans, quand ce drame s’est produit.
« Le chauffard présidentiel était reparti. Tranquille, arrogant, comme le sont les meurtriers d’État » (Philomé 2022, p. 20).
Comme tant d’autres jeunes de son époque, Gabriel a préféré l’exil volontaire à l’environnement non sécuritaire qui asphyxie les rêves et les espoirs. À ce climat délétère s’ajoute un régime politique sanguinaire qui donne tellement d’amertume et d’aversion aux gens.
« […] Sans patriotisme mal placé, sans aucun sentiment de trahison, par fournées entières, nous, jeunes, mages défroqués, espoirs asséchés par des régimes répugnants, abandonnions la partie… » (p. 47).
Le jeune aventurier ne reste jamais longtemps au même endroit. Il mène une vie à la dérive entre Haïti, la France, le Sénégal et les États-Unis. Le personnage est par moments confus, souhaitant vivre ici et ailleurs, partout et nulle part à la fois.
« […] Méfie-toi de la vie. C’est une chieuse. Vis sans t’arrêter. » (p. 65).
Depuis sa première relation au Cap-Haïtien avec Danissa qu’il a perdu de vue, Gabriel ne donne plus de vacances à son cœur. Il trouve d’abord un réconfort dans les bras et l’odeur de lilas de Meredith, cette femme mystère qu’il a rencontrée à la gare Nice-Paris. Les hanches débordant de volupté de sa nouvelle conquête effacent en peu de temps les souvenirs de la femme-feuille Danissa Norvilus.
Puis, il roule sa bosse quelque temps plus tard au Sénégal. Son idylle avec Meredith prendra alors un coup. Il croise vite la route de Consuelo dans les rues sableuses de Dakar. Avec cette artiste sénégalaise d’origine brésilienne, il vit des moments d’amour intenses, des plaisirs débridés et de fortes complicités. Malheureusement, entre incompréhensions et jalousies, Consuelo le quitte alors qu’elle est enceinte. Mérédith refait surface dans sa vie instable, mais disparaît aussitôt. La jeune dame se suicide sous ses yeux.
« Comme dans ces tragédies à l’ancienne, elle venait mourir sous mes yeux. Dans les siens, avant que ne parte le coup, j’ai vu toute la joie et la peine du monde mélangées. » (p. 98.)
Vagabondages éphémères magnifie la soif de liberté et le goût de l’aventure qu’on retrouve souvent chez des jeunes. Le roman met aussi en avant les cassures qu’engendre la migration chez ceux qui sont obligés de fuir leur pays volontairement ou contre leur gré.